Bonjour Irénée,
Quel questionnement terrible pour vous ! Il faut de la lucidité pour l’aborder !
Vous soulevez le souci d’être mis en cause pour ce que vous nommez ( ou que les autres nommeraient) violences exercées sur personne vulnérable.
N’y allons pas par quatre chemins : votre épouse ne peut pas comprendre ce qui se passe en raison de sa maladie à un stade avancé, mais elle requiert absolument tous les soins que vous lui prodiguez. Vous êtes dans une démarche obligatoire et qui lui offre de maintenir sa dignité sur l’hygiène, son allure et donc son mieux. Vous le dites : « Après, retour à la normale ».
Voici quelques réflexions dont la pratique depuis fort longtemps est presque toujours couronnée de succès. Car il existe fort heureusement des techniques appliquées par des établissements, des soignants sérieux, formés et persuadés que « bien faire est tout bénéfice pour soignés, proches et soignants » :
Même si la maladie est avancée, elle ressent beaucoup de choses, bien que peut-être elle ne puisse pas les nommer.
- Soit elle sent qui vous êtes et elle refuse que vous exerciez sur elle une intrusion dans son intimité.
- Soit elle vous prend pour un étranger et elle est terrifiée.
- Soit cela réveille de mauvais souvenirs.
- Soit elle refuse de passer la main sur des choses qu’elle ne sait plus faire.
- Soit les conditions ne lui conviennent pas : froid, complètement nue, sensation de confinement dans un espace étroit et peur.
Vous avez là des petits curseurs à bouger pour ne pas avoir à vivre des moments exténuants, qui d’ailleurs finissent par vous poser question :
- La toilette complète n’est pas toujours obligatoire quotidiennement.
- Le change et la toilette intime sont mieux vécus si le reste des habits n’est pas ôté.
- Faire tenir un objet rassurant, mettre de la musique, réchauffer par des serviettes chaudes, aide beaucoup.
- Et peut-être que votre épouse serait plus à l’aise avec un(e) intervenant(e).
Quand à la « violence », mettez des mots :
- Tu vas te sentir agressée n’est-ce-pas ? Pourtant je ne le souhaite pas ! Aide moi à t’aider un peu ! Faisons cette toilette ensemble ! Il faut qu’on soit beaux tous les deux !
- Oh ! ces cris ! Est-ce que ça te soulage ? pourquoi ne pas chanter ? Respirer ?
- Ce sont de mauvais souvenirs ?
Et puis, cheminez un peu plus loin : Pourquoi je fais autant et dans ces conditions si dures ? Est-ce que je ne pourrais pas passer la main une fois ou deux ?
Au vu du questionnement dont vous nous faites part, structurez une belle technique de soins, formez-vous auprès d’organismes, lisez quelques ouvrages et vous apprendrez beaucoup de choses qui vous aideront car elles ne s’inventent pas. Ne restez pas seul à tout gérer.
Et vous serez protégés de toutes critiques.
Vous faites au mieux, certainement fort bien, mais, si les proches aidants prennent en charge des soins, ils n’en sont pas moins aidants non professionnels.
Vous allez y arriver fort bien
Bien à vous
Des références :
- Formations Médéric Alzheimer, France Alzheimer et tant d’autres
- Nos articles sur les soins (« Moment de la toilette : et si on voyait les choses autrement »)
- La BIBLE du soin aux personnes atteintes de troubles cognitifs : Ouvrage d’Yves Gineste et Rosette Marescotti : « Humanitude »