Alzheimer et Trisomie 21 : quel est le rapport ?

Alzheimer et Trisomie 21 : quel est le rapport ?

Les ravages de la maladie d’Alzheimer sont particulièrement frappants chez les personnes porteuses de trisomie 21, atteintes bien plus largement et plus tôt que le reste de la population. Quels facteurs expliquent ce risque accru ? Cette prédisposition est-elle inéluctable ? Quelques éclairages dans cet article.

En un demi-siècle, les progrès de la médecine ont permis d’allonger l’espérance de vie des personnes porteuses de trisomie 21 au-delà d’une soixantaine d’années, mais aussi de constater qu’à l’approche de la vieillesse, elles semblent bien plus touchées que les autres par la maladie d’Alzheimer. En effet, les récentes études européennes et américaines montrent que 77% des personnes porteuses de trisomie 21 connaissent un déclin cognitif entre 60 et 69 ans. Cette lourde proportion laisse perplexe, surtout quand on la compare à celle des cas Alzheimer dans la population âgée générale, qui oscille plutôt entre 2 et 4 % pour la même tranche d’âge (France). Ces ravages de la pathologie parmi les personnes porteuses de trisomie 21 sont d’autant plus impressionnants qu’ils se déclarent souvent tôt : 55% d’entre elles connaissent déjà un déclin cognitif entre 40 et 49 ans !

En cause, le gène APP !

Comment expliquer cette prévalence frappante de la maladie d’Alzheimer chez les personnes porteuses de trisomie 21 ? Le premier à s’être penché sur la question est le neuropathologiste G. A. Jervis : dès 1948, soit à peine quarante ans après la description de la maladie d’Alzheimer, il observe trois patients porteurs de trisomie 21 présentant les caractéristiques neuropathologiques de la maladie d’Alzheimer et un fort déclin cognitif. L’explication essentielle se profile dans les années 1990 : l’un des principaux gènes responsables de la maladie d’Alzheimer est l’APP (Amyloid Protein Precursor) produisant des dépôts amyloïde dans le cerveau des personnes atteintes par la maladie d’Alzheimer est identifié. 

Quel rapport avec la trisomie 21 ? Nous y venons : il se trouve que ce fameux gène APP est situé sur le chromosome… 21, oui justement celui que les porteurs de trisomie 21 possèdent en trois exemplaires au lieu de deux ! L’APP se révèle donc particulièrement néfaste chez ces personnes, car il est présent dans un plus grand nombre de copies : sa surexpression entraîne une production excessive des peptides amyloïdes toxiques et, par conséquent, un risque considérablement accru de développer un déclin cognitif. 

Des solutions à l’horizon ?

Dans la mesure où elles représentent un cas rare de prédisposition génétique à la maladie d’Alzheimer, les personnes porteuses de trisomie 21 sont de précieux alliés pour la recherche autour de cette pathologie : elles fournissent l’occasion privilégiée de mener observations et tests sur des sujets atteints, avant même l’apparition des symptômes. En participant à des protocoles au plus tôt, elles contribuent à mieux en comprendre les stades précoces, à trouver de nouveaux biomarqueurs et à administrer les traitements en amont. Pourvu que les études auxquelles elles participent ainsi en nombre leur permettent un jour de déjouer la fatalité génétique qui pèse sur eux et de vieillir libérées de la menace Alzheimer ! Le Docteur Marie-Claude Potier, directeur de recherche au CNRS spécialiste de ce sujet, place notamment quelques espoirs à cet égard dans des essais cliniques de traitement anti-amyloïde démarrés au plus tôt, ainsi que dans des thérapies réduisant la surexpression de gènes du chromosome 21…

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