Salariés des Ehpad : quelles obligations, quelle protection ?
Nous avons vu les obligations, droits et responsabilité du directeur d’établissement. Mais qu’en est-il des salariés des établissements ? Comment sont-ils protégés et quel appui peuvent-ils donner aux aidants et leurs proches ?
Les aidants s’inquiètent souvent de mettre en cause les conditions de travail des professionnels qui s’occupent de leurs proches. Ils ne veulent pas pénaliser ceux qui font leur métier dans des conditions souvent difficiles.
Ces professionnels sont souvent pris entre leur devoir de loyauté à l’égard des personnes dont ils s’occupent et le lien de subordination qui les lie à leur employeur.
La réglementation du signalement
Les professionnels sont protégés par la règlementation du signalement, en raison du conflit qui peut exister avec le secret professionnel. Ils sont aussi protégés contre le harcèlement moral.
En quoi consiste cette protection des professionnels qui permet de trouver appui auprès de ceux qui n’apprécient pas leurs conditions de travail, qu’ils jugent indignes à l’égard des personnes dont ils s’occupent ?
Le signalement est une obligation pour le directeur et pour les salariés d’un établissement. L’article 226-14 du Code pénal lève le secret professionnel pour toute personne et particulièrement les professionnels de la santé et du secteur sanitaire et social, qui informe les autorités judiciaires, médicales ou administratives, de privations ou de sévices, y compris lorsqu’il s’agit d’atteintes ou de mutilations sexuelles, dont il a eu connaissance et qui ont été infligées à un mineur ou à une personne qui n’est pas en mesure de se protéger en raison de son âge ou de son incapacité physique ou psychique.
Ce signalement est une obligation pour tout professionnel. Il ne peut être sanctionné pour avoir signalé de bonne foi les maltraitances dont il a eu connaissance.
Cette obligation concerne tous les professionnels des établissements hospitaliers, de santé, ou les maisons de retraite, quel que soit leur statut. Le Code pénal précise que le professionnel de bonne foi qui fait un signalement ne peut subir aucune sanction administrative ou disciplinaire, même s’il s’est trompé sur les circonstances qu’il a décrites.
Quelle protection pour ceux qui dénoncent ?
Une législation protectrice complémentaire a donc été mise en place par le Code du travail qui s’applique aussi aux salariés des Ehpad. Ces lois organisent un mécanisme protecteur des lanceurs d’alerte qu’il faut connaître et faire connaître, car de nombreux professionnels ne sont pas d’accord avec les conditions dans lesquelles on les fait travailler.
Il s’agit pour une entreprise, en l’occurrence un établissement ou un service à domicile, d’organiser des actions ou des procédures par lesquelles l’établissement va se conformer dans les faits aux règles qui s’appliquent à lui. En droit de la santé, il s’agit du Code de la santé publique et du Code de déontologie médicale. Pour la partie hébergement, il s’agit des principes de la loi du 2 janvier 2002, énoncés dans le Code de l’action sociale et des familles qui s’appliquent à tous les établissements.
Mais la réglementation est tellement complexe que les protagonistes se renvoient les responsabilités : qui est responsable du bon respect des normes et de tous les règlements ? Le personnel, le directeur, l’organisme gestionnaire de l’établissement ? Autant alors prévoir des mécanismes de contrôle et de prévention. C’est ce qui a été mis en place dans le cadre du droit du travail. Les salariés peuvent intervenir, à leur choix, par la voie hiérarchique ou anonymement.
Plutôt que de chercher à protéger sa responsabilité, l’institution doit chercher à prévenir les risques. Tout le monde y a intérêt : les personnes hébergées ou soignées et leurs proches qui verront enfin leurs besoins pris en considération, les professionnels qui travailleront dans de meilleures conditions et les instances dirigeantes qui ne seront pas soumises à des rapports de force : personnels contre usagers en se voyant mis en cause dans leur pouvoir de direction.
Cette protection est à rapprocher de celle du harcèlement moral en droit du travail : « aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation de ses conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d’altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel. »
La personne harcelée n’a pas à faire la preuve du harcèlement, c’est à l’harceleur de prouver qu’il n’a rien fait. Ce changement est considérable.
Que se passe-t-il lorsqu’une alerte est lancée ?
L’établissement doit ordonner une enquête interne, afin de vérifier la conformité de son fonctionnement. Si des dysfonctionnements sont constatés, y porter remède. Il s’agit souvent d’une simple question d’organisation et d’état d’esprit. L’agence régionale de santé doit y contribuer.
Ainsi, le Code du travail s’ajoute au Code pénal pour protéger efficacement les lanceurs d’alerte, non seulement dans leur statut professionnel, mais aussi dans leurs conditions de travail. Les aidants doivent les soutenir, car les professionnels sont leurs meilleurs alliés pour assurer le bien-être de leurs proches.
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