Et si la culpabilité était utile ?
Placé au cœur de la culture judéo-chrétienne par le péché originel, dénoncé par Nietzsche comme étant l’expression d’une sorte de nihilisme, le sentiment de culpabilité est envisagé le plus souvent sous l’angle moral. Sans entrer dans les profondeurs abyssales de réflexions philosophiques, interrogeons-nous sur la raison d’être de cette émotion particulière qui se traduit par une forme de rejet de soi.
La culpabilité est-elle donc-néfaste en soi ? Est-il possible de s’en exonérer et que se pass-t-il alors ?
Il existe des personnes présentant des structures psychologiques particulières, que l’on appelle des psychopathes, qui ne ressentent pas de culpabilité face aux conséquences de leurs actes. Ces individus présentent par ailleurs une difficulté à s’adapter aux règles sociales et une forme d’insensibilité à la souffrance de l‘autre ainsi qu’une incapacité à tirer leçon de leurs erreurs. C’est le cas de délinquants qui, à peine sortis de prison à la suite d’un délit, récidivent pour se retrouver à nouveau incarcérés.
Les difficultés rencontrées par ce type de personnalité met en évidence la fonction adaptative de la culpabilité dont l’utilité serait de nous permettre, par le ressenti déplaisant qu’elle entraîne, de ne pas rééditer un comportement en désaccord avec la morale que nous avons intégrée et de nous maintenir dans un consensus social favorisant une meilleure adaptation. Elle se fonde d’une part sur notre capacité d’empathie, cette aptitude à se mettre à la place de l’autre, et d’autre part sur notre éducation. Dans sa dimension positive, la culpabilité nous permet d’assumer nos actes, d’en tirer des conséquences, voire de nous amener à réparer nos erreurs : en ce sens, elle nous aide à nous améliorer.
Cependant, si se sentir coupable suppose se sentir responsable, l’inverse n’est pas nécessairement vrai : je peux très bien être à l’origine d’un événement aux conséquences négatives pour autrui, pensant bien faire, sans pour autant être coupable. Dans le même ordre d’idées, si illégalité rime souvent avec moralité, certaines actions illégales peuvent être considérées comme morales, comme cela a pu l’être sous l’Allemagne nazie où des actes de désobéissance jugés comme une trahison par les autorités de l’époque ont pu être, après la guerre, considérés comme héroïques.
Par ailleurs, et paradoxalement, cette culpabilité nous apprend que nous avons un pouvoir sur notre environnement, puisqu’elle nous place en situation de fautif, donc de responsable de ce qui arrive. Dans cette mesure, elle nous donne le sentiment que nous avons un contrôle sur le monde et les autres. C’est peut-être ce qui explique pourquoi parfois, face à une situation où, justement, nous n’avons pas le contrôle, par exemple la dégradation de l’état d’un proche pour laquelle nous ne pouvons rien, nous nous sentons malgré tout coupables : sans doute faut-il y voir là l’expression d’une stratégie inconsciente visant à maintenir en nous l’illusion du choix.
A partir de quel moment doit-on considérer que notre culpabilité devient inapdaptée ?
Une culpabilité non justifiée peut accompagner différents états pathologiques, comme les dépressions, ou encore certains états névrotiques. La culpabilité que nous pouvons alors ressentir n’est dans ce cas pas liée à notre responsabilité face à une quelconque action mais à une perception altérée de notre rapport au monde. La solution est de se faire aider par un professionnel.
Une culpabilité exagérée peut également être un moyen d’échapper à nos responsabilités : une des façons de se soustraire au risque de se sentir coupable n’est-il pas encore de ne rien faire ?
Que faire face à la culpabilité, comment arriver à se pardonner?
Si il s’agit de situations où nous nous sentons coupables d ‘un acte en désaccord avec notre système moral, il reste toujours la possibilité de réparer, dans la réalité ou bien de manière symbolique, à moins que ce ne soit notre système moral qui, par sa rigidité, soit à remettre en cause.
Malgré tout, il existe des situations où il est difficile de ne pas ressentir de la culpabilité, bien qu’elle soit injustifiée, comme lorsque nous voyons un proche dans la difficulté malgré notre dévouement.
Que faire, alors ? Le point important est de réaliser que nous ne sommes pas tout-puissants, d’accepter nos limites, et de lâcher prise, ce qui est une manière d’accepter les choses telles qu’elles sont. Ici également un professionnel peut nous accompagner dans cette démarche.
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