Quand être aidant ne va pas forcément de soi…
Étymologiquement, « accompagner » signifie « partager le pain », « être à côté de ». Accompagner un proche, demande une vraie présence à l’autre, une écoute, un respect de ce qu’il vit. C’est aller à sa rencontre, et pour cela il faut être prêt : être aidant ne va pas de soi. En même temps, difficile de ne pas devenir aidant d’un être cher en soins palliatifs ou en fin de vie, quand il est vulnérable et qu’il a besoin de nous. Voilà toute la difficulté à laquelle doit répondre un aidant. Et à chacun sa réponse…
Pas de soins palliatifs sans aidants
L’évolution rapide de la médecine ces 30 dernières années a permis aux hommes et aux femmes de voir leur espérance de vie se prolonger. La transformation de la prise en charge de la maladie, avec parfois des traitements longs, a eu pour conséquence l’engorgement des services de soins et en réponse, la domiciliation. Ce n’est pas la seule raison du transfert de l’hôpital au domicile.
En fin de vie, les malades souhaitent rester chez eux, dans leur univers, entourés de leurs proches et garder un lien avec la société. 70% des Français souhaiteraient mourir chez eux. Cette évolution appelle un développement des soins palliatifs et une grande présence des aidants, repoussant toujours leurs limites. Pour eux, c’est une épreuve avec des conséquences physiques et psychiques qui s’inscriront dans le temps.
Être aidé à aider
La maladie arrive dans un parcours de vie entraînant avec elle l’ensemble de la famille. La maison accueille maintenant la valse des professionnels de santé, avec qui il n’est pas toujours simple de communiquer. Le lit médicalisé intègre la salle à manger. Le lieu de vie devient un lieu de soins. On a l’impression que l’hôpital est arrivé à la maison. Cela demande une grande adaptation du domicile et des conditions d’hébergement spécifiques.
Plus la phase de la maladie avance, plus la quantité d’actes des soins prodigués par les aidants sont importants. C’est une réalité.
Tout cela n’est pas sans risques pour les aidants sur le plan psychologique, avec des symptômes anxiodépressifs, de la détresse morale ou émotionnelle importante, des troubles du sommeil, etc. Cela a aussi des incidences sur le plan relationnel – être aidant isole – ou sur le plan pécuniaire.
Et puis, dans ce contexte, comment retrouver sa place ? Comment redevenir la femme de son mari, la mère de son enfant ou encore le fils de ses parents ? Les études montrent que les aidants ont le même niveau de détresse que les patients.
Face à cette situation, ils souhaitent être aidés à aider, en tenant compte de leurs expériences individuelles. Ne parlons pas des aidants comme d’un nouveau corps dans notre société, mais plutôt d’une myriade de personnes, avec leurs spécificités et leur singularité.
Accepter le doute et le questionnement
Devenir aidant quand un proche en a besoin nous semble naturel. Mais se pose-t-on la bonne question et en a-t-on la possibilité ? Le droit ? Le temps ?
Tout d’abord, de quoi s’agit-il concrètement ? Préparer les repas de son père ? Ou plutôt faire sa toilette, le lever et le coucher chaque jour ? Quelles missions sommes-nous prêts à accepter ? Avons-nous une vue claire de ce qui nous attend ? Est-on prêt à mettre entre parenthèses notre vie personnelle et professionnelle ? Si oui, pourquoi ? Parce que l’on en a envie ou par obligation ? Par peur de dire « non » et d’être jugé ? J’en suis où, moi, dans tout ça ?
Se poser la question, ce n’est pas un manque d’amour ou un excès d’égoïsme. Nous ne sommes pas tous prêts à assumer ce rôle parce que ce n’est pas le moment dans notre vie ou pour des raisons d’expérience, d’éducation, de relation, etc. Et nous en avons le droit ! Le droit au moins de se poser la question de l’aidant que nous souhaitons ou pouvons être, d’en parler, de cheminer, de changer d’avis, d’hésiter et de se poser à nouveau la question, car rien n’est définitif.
Prenons le temps de réfléchir à un projet sur mesure et d’imaginer notre rôle dans le trio proche, aidant et professionnel. Ce dont nous sommes convaincus à l’Association française des aidants, c’est que tous les choix et toutes les postures doivent être possibles. C’est ce qui est appelé l’autodétermination. Pour nous, prendre soin, c’est aussi accepter le doute et le questionnement.
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