Partie 1 – Quand l’abus de faiblesse s’invite dans la fratrie !

Partie 1 – Quand l’abus de faiblesse s’invite dans la fratrie !

Corinne est l’aidante de sa maman de 93 ans depuis que son père est décédé il y a 5 ans. Tout se passait bien. Elle avait mis en place les services nécessaires pour que sa maman vive au mieux chez elle et elle allait la voir tous les 3 mois. Et puis la situation a “explosé” quand elle s’est aperçue que l’un de ses frères s’était installé chez sa mère, qu’il y avait eu des dépenses et des retraits d’argent non justifiés et surtout, ce qui l’a inquiétée le plus, c’est que lorsqu’elle l’appelait, c’était toujours lui qui décrochait.

Vous avez une histoire familiale singulière qui peut nous éclairer sur les récents événements, que pouvez-vous nous dire ?

Je suis la benjamine d’une fratrie de 6 enfants. Je suis née 11 ans après l’aînée et 6 ans après la 5e. Mes frères et sœurs sont partis très tôt de la maison, ce qui fait que je me suis retrouvée comme une enfant unique. Je devais avoir 11 ou 12 ans. Je n’ai rien partagé avec mes frères et sœurs et je n’ai que de vagues souvenirs de la période où ils étaient à la maison. Pour moi, ils sont un peu comme des étrangers et même adulte, je ne les fréquentais pas, si ce n’est une fois par an lors d’un repas familial quand nous étions tous en région parisienne. Mais ça fait 35 ans au moins. Quand j’étais jeune, ma mère m’appelait « son petit bâton de vieillesse » ! Cette expression a pris tout son sens quand mon père est décédé il y a 5 ans.

Est-ce pour ça que je suis devenue aidante naturellement sans me poser de question ou bien est-ce parce que le jour de la crémation de mon père, ils sont tous repartis chez eux sans se soucier de ma mère, sans penser qu’elle aurait peut-être aimé avoir ses enfants près d’elle dans ce moment difficile ? Ils ne se sont pas inquiétés non plus de savoir comment elle allait vivre seule et comment elle allait gérer les papiers ! C’est mon père qui s’occupait de tout.

Je suis restée avec elle 10 jours pour m’occuper des déclarations, des reversions de retraite… Ma mère était anéantie. Elle restait dans son fauteuil toute la journée et semblait complètement perdue. Elle l’était d’ailleurs je pense ! Et puis j’ai dû repartir car des 6, je suis la seule encore à travailler et celle qui habite le plus loin. Alors, je me suis organisée pour gérer les papiers de chez moi et je descendais la voir tous les 3 mois. Mais autant vous dire que ce n’était pas des vacances ! Je n’arrêtais pas du matin au soir. Au début, elle était autonome. Elle sortait, elle se faisait à manger, elle lisait beaucoup et “bricolait” comme elle dit. Je n’ai jamais rien demandé à mes frères et sœurs. J’en parlais juste à une sœur et un frère que je voyais avec lesquels j’ai de bonnes relations.

Et puis, il y a un an et demi, assez brutalement, sa mémoire est devenue inquiétante. Elle oubliait tout ce qu’on lui disait même nos anniversaires et plus grave, la poêle sur la plaque électrique. Elle a déclenché l’alarme plusieurs fois ! Elle semblait détachée de tout. Quand je lui demandais comment elle se sentait, elle me disait : « Oh tu sais maintenant, j’en ai marre. Je me sens fatiguée, je dors beaucoup et j’oublie. Et puis je pense souvent à papa et je pleure ! »

C’est à ce moment-là que j’ai pu mettre en place une aide à domicile. Je lui en parlais depuis un an déjà mais elle ne voulait personne. Aujourd’hui, elle a une aide à domicile matin et soir, les repas livrés 7j/7 et une aide-soignante matin et soir 7j/7. Et puis j’ai dit à l’aide à domicile de retirer les boutons des plaques électriques.

Vous ne parlez pas de vos frères et sœurs. Ils ne s’inquiétaient de rien ? 

Eh bien non, je ne parle pas d’eux car comme je vous l’ai dit, ils ont repris leur activité comme si de rien n’était au décès de mon père et depuis 5 ans, s’ils allaient voir notre mère une fois par an, c’était un exploit et encore j’usais de toute ma diplomatie pour leur suggérer d’y aller ! Quant à l’un de mes frères, qui vit à quelques kilomètres, il venait déjeuner de temps en temps avec ma mère mais c’est tout.

Vous dites que la situation a explosé. Que s’est-il passé ? 

L’été dernier, j’ai vu que ma mère ne lisait plus, ne faisait plus ses mots croisés et elle me disait que son écran TV était trouble. J’en ai parlé à l’aide à domicile qui m’a donnée les coordonnées d’un ophtalmologue. Comme je le pensais, elle avait la cataracte. J’ai donc lancé l’opération et j’ai demandé à un autre de mes frères de s’occuper des premiers rendez-vous. Les opérations des yeux ont été programmées mais il y avait des soins importants après chaque opération.

C’est là que mon autre frère, celui qui habite le plus près, m’a appelée pour me dire qu’il s’en occuperait le temps des soins. Je ne sais pas pourquoi, mais même si ça paraissait être une bonne idée, j’avais une inquiétude. Il faut dire qu’il a des antécédents avec les personnes âgées. Ma sœur m’avait raconté qu’il s’était vanté s’être fait payer une voiture par une “vieille” dont il s’occupait dans son immeuble et qu’il avait sa carte bleue ! Tout en me disant qu’il ne ferait quand même pas ça avec sa mère, j’étais en alerte. Mais, ça restait une bonne solution. Il s’est donc installé chez ma mère et je l’avais au téléphone souvent même quand c’est ma mère que j’appelais ! Il faisait barrage. C’est toujours lui qui décrochait. Et quand je lui faisais remarquer, il me disait : “j’étais à côté” ou “maman est dans la salle de bain ou aux toilettes”. Ma sœur et mon frère avaient constaté la même chose. Ça m’a inquiétée d’autant que quand il me la passait au téléphone, elle n’était plus comme avant. On avait l’impression qu’elle ne pouvait ou ne voulait pas parler. Elle semblait sous emprise. Enfin, c’était mon impression. Elle me disait “ça va toi, il fait beau chez toi” et c’était à peu près tout. Ensuite, elle me disait : “Je te passe ton frère”.

Là j’ai vraiment eu des doutes et au lieu de venir comme prévu à Noël, j’ai décidé de descendre pour le 1er novembre. Mon frère était déjà là depuis début septembre. Il était convenu que quand j’arrivais, lui repartait chez lui pour ne revenir qu’à mon départ.

Lire la suite du témoignage de Corinne.

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