Communiquer avec une personne âgée très désorientée : la méthode de Naomi Feil
Les proches aidants comme les professionnels sont désarmés face aux comportements jugés incohérents des personnes âgées très désorientées qui n’ont plus les mots et qui ne vivent plus dans le même monde qu’eux. Comment comprendre ce qu’ils essayent de nous dire au travers de leurs attitudes, de leurs gestes ? Comment faire pour maintenir un lien, une communication avec un proche âgé très désorienté ?
Naomi Feil est américaine. Elle a grandi dans une maison de retraite dirigée par son père. Après ses études et dans la continuité des travaux menés par son père, elle s’est spécialisée dans l’accompagnement et la communication avec les personnes âgées très désorientées. Déçue à l’époque par les pratiques de prise en charge de ces personnes, elle s’attache à développer sa propre méthode. Ainsi, pendant 17 ans, entre 1963 et 1980, elle met au point et expérimente cette technique qu’elle nomme « validation ». Voici quelques éléments de compréhension pour appréhender cette pratique et tenter d’entrer en relation avec son proche désorienté, atteint de démence.
Qu’est-ce-que la méthode de « validation » proposée par Naomi Feil ?
Cette méthode a pour objectif de permettre à toute personne qui le souhaite, aidant familial, proche ou professionnel, de maintenir une relation avec une personne âgée très désorientée dans le respect de son identité et de sa dignité, en s’appuyant sur son histoire, son vécu.
Adhérer à cette pratique, c’est penser que « l’âge extrême de la vieillesse sert à quelque chose » et que la personne désorientée, démente, au travers de son comportement, exprime son besoin d’exister et d’être entendue.
Le principe développé par N. Feil est simple : il s’agit de rentrer dans le monde de la personne âgée désorientée, dans sa propre réalité… et non l’inverse !
Mais alors comment faire pour tenter d’entrer en relation avec une personne âgée très désorientée ?
Pour tenter de communiquer avec une personne qui n’a plus la capacité de s’exprimer avec des mots ou plutôt qui n’utilise plus les mêmes « codes » que nous, il est essentiel de mettre tout en œuvre pour instaurer une relation de confiance afin qu’elle se sente apaisée et en sécurité. Pour cela, il est nécessaire que le proche « s’y prépare », qu’il se mette en situation de lâcher-prise, qu’il fasse fi des préjugés, du sens et de tout raisonnement rationnel pour être totalement à l’écoute de la personne désorientée et tenter d’entrer dans « son monde ». S’essayer à la validation selon N. Feil demande une grande faculté d’empathie, c’est-à-dire d’avoir la capacité de se détacher de soi pour prendre en compte les émotions de la personne désorientée, d’essayer de ressentir ce qu’elle ressent, d’être en phase avec elle, sans jugement.
Tenter d’établir une connexion avec une personne désorientée quand les mots ne sont plus accessibles, c’est faire appel aux sens, au vécu de la personne, aux liens émotionnels. C’est l’accompagner par un regard bienveillant, une écoute active, un toucher apaisant, une tonalité de voix calme et rassurante. C’est laisser les émotions et les sentiments s’exprimer et essayer de comprendre ce que la personne veut nous dire, trouver un sens à ce qui n’en a pas pour nous. Dans un climat apaisé, on pourra l’accompagner dans ses mouvements, ses mimiques…
Pour éclairer ces propos, je vous invite à regarder cette vidéo qui illustre bien cette pratique de validation proposée par Naomi Feil :
Enfin, on l’a vu, s’appuyer sur cette méthode basée sur l’empathie, c’est se donner les moyens de rentrer dans le monde de l’autre, sans vouloir y mettre de cohérence, de bon sens. Ainsi, il sera totalement vain d’essayer de convaincre la personne désorientée de notre réalité, la réalité !
Combien de fois a-t-on entendu par exemple : « elle pense que son mari est encore là et qu’il va venir la voir ». Dans cette situation, le proche ou le professionnel pourra « valider » ces propos en faisant appel à des souvenirs agréables de sa vie avec son mari. Lui mentir « votre mari va venir vous voir » ou l’exposer à la réalité « votre mari est décédé » ne fera que raviver son angoisse et son insécurité.
Dans cet autre exemple : « elle dit qu’on lui a volé ses vêtements », il s’agira d’utiliser le mode qui ? quoi ? où ? quand ? comment ? : « qui les a pris ? » « quand ont-ils disparu ? » ce qui aura pour effet de lui permettre d’exprimer ses émotions et ainsi de calmer ses tensions, sa colère, sa tristesse.
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