Comment gérer nos relations avec les équipes pluridisciplinaires qui interviennent au domicile ?
Si le domicile est le « siège légal d’une personne* », dès que cette dernière entre dans la dépendance, il devient également un carrefour où vont interagir la personne dépendante, l’aidant et le(s) professionnel(s).
1er constat : le domicile est le lieu au sein duquel vont devoir se rencontrer les solidarités familiales et les interventions des professionnels. L’acceptation de la situation de dépendance d’une personne âgée est souvent complexe et difficile. L’arrivée (souvent non choisie par la personne elle-même) d’un professionnel peut renforcer ce sentiment « d’être dépendant » et de ne plus servir à rien. L’aidant se retrouve alors à devoir composer avec ce difficile équilibre d’une relation à trois.
2ème constat : en tant qu’aidant, nous attendons de l’aide de la part des professionnels. Pour autant, nous ne voulons pas être « dépossédés » de notre savoir-faire, ni de notre rôle auprès de la personne dépendante. La présence de professionnels peut, dans un premier temps, être bien accueillie. Mais il n’est pas rare qu’au fil du temps, leur présence fasse resurgir un sentiment de culpabilité de « moins s’occuper » de notre proche ou encore de ne plus faire face au défilé impressionnant de professionnels tout au long de la journée : infirmier, kiné, aide à domicile, médecin, assistante sociale, ergothérapeute… Comment alors ne pas perdre le contrôle de la situation et comment rester maître de la coordination au domicile ?
3ème constat : le temps du professionnel n’est pas le même temps que celui de l’aidant ou de la personne dépendante. Il est quelquefois bon de rappeler au professionnel qu’il est (ici pour l’exemple) le 4ème à passer depuis le matin et que cela lui demandera plus de tact et de patience pour ne pas donner l’impression « d’expédier » un soin ou une toilette. En effet, la personne dépendante peut vivre comme une intrusion cette succession de professionnels, pourtant là pour son bien-être. En tant qu’aidant, notre rôle tient aussi à faire le lien et re-contextualiser pour le professionnel (pris dans sa journée et ses plannings) afin de tenir compte de la réalité vécue par la personne dépendante.
4ème constat : attention à garder la bonne et juste distance avec les professionnels. Compte-tenu de la proximité et de la fréquence des interventions, il arrive souvent que la relation – au départ professionnelle – évolue vers une relation plus affective. Or, l’affect peut à terme être une difficulté quand il s’agira de rappeler au professionnel que vous tenez à telle ou telle chose, que vous n’êtes pas satisfait de la qualité de l’intervention… L’adage dit « Faire confiance n’exclut pas le contrôle ». Faites-le vôtre. Ne perdez pas de vue que l’objectif est le bien-être de votre proche. Une relation professionnelle peut être chaleureuse et bienveillante, mais elle reste une intervention professionnelle.
5ème constat : pour l’aidant et la famille, le domicile représente un lieu riche de significations psychoaffectives et sociales. Pour le professionnel, c’est un lieu et un outil de travail. Le professionnel est donc dans l’obligation de l’adapter « a minima » pour répondre aux exigences de son métier (sécurité, accessibilité, pratiques de soins…). Pour cette raison, mettez en place dès le début une communication de qualité sur vos attentes, vos appréhensions mais aussi sur ce qui est nécessaire au professionnel pour que son intervention soit efficiente. De cette manière, vous aurez moins le sentiment de subir la situation.
Nous l’avons compris, et pour beaucoup d’aidants, nous avons expérimenté cette relation quelquefois difficile à gérer avec les professionnels.
Pour synthétiser, il semble important de garder la maîtrise de la situation. Une fois l’urgence passée, autorisez-vous une analyse objective de la situation et listez l’ensemble des éléments et professionnels qui interviennent dans l’accompagnement de votre proche.
Quelques pistes :
- Recensez l’ensemble des contacts, noms et numéros de téléphone des responsables de structures ou de services.
- Questionnez les professionnels sur leur mission, leurs attentes, leurs impératifs et dites-leur quels sont les vôtres pour que chacun soit reconnu dans son rôle.
- Reprenez vos contrats ou autres documents qualifiant et encadrant la mission d’intervention au domicile et relisez-les à tête reposée. Si nécessaire, reposez des questions.
- Appuyez-vous sur les documents de transmission utilisés par les professionnels (après avoir validé avec eux la possibilité pour vous d’avoir accès aux informations inscrites à l’intérieur, secret professionnel oblige…).
- Proposez et organisez des « réunions » de régulation et d’échange, en dehors du temps de soin si possible ; cela vous permettra de faire le point et de pouvoir le cas échéant faire évoluer les modalités d’interventions.
- Enfin, félicitez-vous de la cordialité de votre relation avec les professionnels mais veillez à maintenir une « juste » distance afin d’être en capacité si besoin de jouer votre rôle de « chef d’équipe » !
*Repenser le maintien à domicile – B. Ennuyer – Dunod – 2006
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