Accompagner la personne nécessitant une mesure de protection juridique : les recommandations de la Haute Autorité de Santé
La Haute Autorité de Santé vient de publier un guide remarquable en ce qu’il donne toute sa place aux proches aidants, à tous les niveaux de la protection juridique, en rappelant les principes de la protection des majeurs, de façon qu’ils soient mis en pratique de façon éthique.
Ce guide s’adresse aux mandataires judiciaires, à tous les professionnels de santé, des établissements sociaux et médicaux sociaux, aux services sociaux, aux personnes concernées et à leurs proches aidants.
La recommandation rappelle, de manière concrète et précise, les principes des lois régissant la protection des personnes vulnérables qu’elle soient protégées ou qu’elles ne le soient pas.
Les proches aidants des personnes vulnérables y trouveront un guide précieux pour adapter leur propre comportement à l’égard de leur proche vulnérable. Ce guide leur permettra aussi de rappeler aux professionnels du soins, de l’aide sociale et aux professionnels du droit, les obligations édictées par la loi applicable.
Les différents chapitres rappellent les obligations de tout un chacun à l’égard de chaque personne vulnérable :
- Veiller au respect de ses droits fondamentaux et à la dignité de la personne protégée en les faisant mieux connaître : respect de la vie privée, droit de saisir le juge, participation à la vie sociale : éligibilité et droit de vote, vie associative, activités rémunérées ou de loisir ;
- Veiller au bon équilibre entre le principe du libre choix de la personne et l’obligation de la mettre en sécurité ;
- Veiller au respect de sa dignité, de ses intérêts et de son bien-être ;
- Veiller au respect des principes de :
- Subsidiarité. Ne pas ordonner une mesure de protection si on peut faire autrement pour l’aider sur le plan administratif. Ce principe s’applique surtout en matière de droits sociaux, mais aussi pour le consentement aux soins, car une curatelle n’a jamais permis de faire prendre les médicaments. En revanche, le curateur doit mettre en place les moyens qui le permettent ;
- Nécessité. La protection doit être nécessaire médicalement. La recommandation est très ferme à l’égard des médecins certificateurs. Elle doit aussi être nécessaire administrativement et garantir une assistance utile à la personne ;
- Proportionnalité. La restriction des droits doit être minimale, et rester en proportion stricte avec ce qui est nécessaire. La curatelle, comme la tutelle peuvent être aménagées en sorte que la personne ne soit pas contrainte à une gestion excessivement contraignante de ses affaires. Par exemple, la curatelle renforcée peut être aménagée en sorte que la personne conserve ses moyens de paiement, notamment une carte bancaire de paiement et non seulement de retrait.
- Définir et soutenir l’intérêt de la personne : rechercher avec elle quelles sont ses préférences pour un acte ou une situation donnée, rechercher comment y parvenir et recueillir son consentement, ou à défaut son adhésion. La prise de risque raisonnable est essentielle dans cette phase ;
- Favoriser l’autonomie de la personne protégée : au lieu de se focaliser sur ce qu’elle n’est plus capable de faire, s’appuyer sur ses capacités. Organiser son environnement pour lui permettre la meilleure autonomie possible. Dans cette recherche, la prise de risque raisonnable est possible ;
- Accompagner au mieux les étapes d’une mesure de protection en les faisant mieux connaître :
- Anticipation, par mandat de protection future, remise de procuration bancaire ;
- Évaluation de la situation, en collaboration avec et entre les professionnels ;
- Adhésion, y compris de l’entourage par la médiation par exemple ;
- Choix et suivi de la mesure la mieux adaptée avec un avocat ;
La recommandation propose des solutions pratiques :
- Elle rappelle que les sujets centraux de l’accompagnement sont la prise en charge de :
- La santé. La protection juridique et proposée par définition à des personnes qui ont des problèmes de santé. La prise en charge médicale est primordiale et la protection juridique doit en faire une priorité ;
- Le lieu de vie. Compte tenu des pénuries en matière de soins à domicile et d’hébergement, la protection juridique doit être attentive au respect du choix du lieu de vie ;
- Le budget. Il doit être adapté au mieux à la personne, et non la personne contrainte par le budget si nécessaire ou contrainte par le confort de gestion du gestionnaire ;
- Les actes juridiques. Rappel des actions judiciaires garantissant les droits strictement personnels, simplement personnels, les actions patrimoniales liées aux actes importants de la vie : mariage, divorce, PACS, de successions, etc.
- Mieux outiller les médecins inscrits sur la liste du procureur de la République en proposant une fiche pratique sur l’évaluation de la personne, définir les critères d’appréciation selon les pathologies, les manières de faire, détecter les cas spécifiques, les écrits à produire afin qu’ils établissent des certificats réellement circonstanciés.
La recommandation est accompagnée d’une annexe juridique ainsi que de deux fiches pratiques mais qui concernent plutôt les professionnels :
- L’une concerne les actes de la vie quotidienne afin de mieux informer sur les actes de la vie quotidienne et de mieux comprendre l’accompagnement des protecteurs dans ces actes. Cette fiche reprend les éléments thématiques (citoyenneté, vie familiale, droits fondamentaux, santé, logement, budget) en apportant des éléments concrets, en déconstruisant les idées reçues, notamment sur le plan budgétaire et en rappelant les droits précis ;
- L’autre est à destination des médecins inscrits sur la liste du procureur de la République, leur permettant de situer leur action au sein de l’accompagnement global d’une personne protégée sans l’enfermer dans le système binaire – assistance ou représentation -. Cette fiche a pour objectif de leur donner des éléments juridiques et concrets leur permettant une évaluation de la personne en cas de demande de protection ou de renouvellement. A ce jour, aucun guide n’était proposé aux médecins, ce qui explique la qualité très disparate des certificats produits.
Dans la mesure ou le certificat médical circonstancié reste la pièce déterminante pour la recevabilité et le choix de la mesure de protection, cette unification va sans doute permettre d’obtenir des certificats médicaux circonstanciés de meilleure qualité.
Enfin un argumentaire est proposé en plus de la recommandation pour les personnes souhaitant avoir davantage d’éléments théoriques et techniques notamment juridiques.
Sur tous les thèmes et sujets abordés, la recommandation préconise aux professionnels de collaborer entre eux, ce qui est une grande nouveauté.
Elle impose aux professionnels de s’appuyer sur les proches aidants, pour comprendre la situation, organiser des solutions et communiquer une information à la personne afin qu’elle adhère au mieux possible à la mesure de protection qui la concerne.
Pour en savoir plus et télécharger les recommandations
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