L’inventaire de protection judiciaire, mode d’emploi
La loi sur la protection des majeurs impose d’effectuer un inventaire dans le cadre du mandat spécial, de la curatelle renforcée et de la tutelle. Les proches nommés sont souvent inquiets de la responsabilité qui leur est imposée. Qu’est-ce qu’un inventaire dans le cadre de la protection judiciaire et à quoi sert-il ?
En général, l’inventaire se définit comme la revue détaillée, minutieuse, le recensement de quelque chose (ex. faire l’inventaire de ses souvenirs).
En droit, l’inventaire est destiné à fournir la description, la preuve de l’état et l’estimation des biens appartenant à quelqu’un, une collectivité ou situés dans un lieu déterminé (ex. magasin fermé pour l’inventaire annuel).
Dans quels cas, la loi exige-t-elle un inventaire ?
L’inventaire est souvent facultatif. Il est prévu pour préserver les droits, entre héritiers dans les partages, pour connaitre l’état du patrimoine des époux dans un divorce ou pour justifier de son patrimoine sur le plan fiscal.
L’inventaire est ordonné par le juge au moment de sa décision nommant un mandataire spécial au début de la procédure. Puis, ensuite, au moment du prononcé de la tutelle et de la curatelle renforcée.
Il ne faut pas le confondre avec la déclaration des revenus et des biens qui permet de garantir sa solvabilité pour obtenir un crédit et qui fait partie des conditions pour obtenir un contrat. L’inventaire porte sur le contenu du patrimoine, les biens et les dettes. Il n’est obligatoire que dans le domaine de la protection du patrimoine des mineurs et des majeurs.
Que doit contenir l’inventaire ?
L’inventaire porte sur les biens immobiliers et mobiliers. Les biens immobiliers sont ceux qui font l’objet de publication au Service de la Publicité Foncière : terrains, constructions.
Les biens mobiliers sont tout le reste : actions et parts sociales, valeurs mobilières, comptes bancaires, meubles meublants, bijoux, objets personnels, dont peu font l’objet d’une publicité, mais au contraire sont soumis au secret bancaire ou juridique. La preuve de leur existence et de leur valeur est parfois difficile à établir.
Que doit contenir l’inventaire ?
Comme l’indique sa définition, il a pour objet d’établir la liste, de décrire l’état et déterminer la valeur des biens d’une personne ou d’une activité. Il est destiné à constituer une preuve de la consistance et éventuellement de la valeur du patrimoine à un moment donné.
Comment l’inventaire est-il établi ?
- Par déclaration de la personne ;
- Par recherche des documents à son domicile ;
- Par vérification auprès des fichiers : immobilier, registre du commerce et des sociétés, établissements bancaires et d’assurances ;
- Par détermination de leur valeur par un professionnel de la vente.
Quelles sont les personnes habilitées à faire l’inventaire ?
- Les particuliers : proches du mineur ou du majeur protégé nommés pour être tuteur ou curateur. En présence de deux témoins ou de son avocat pour la personne isolée.
- Les professionnels habilités : huissier, pour l’état descriptif ; commissaire-priseur judiciaire, pour l’état descriptif et estimatif ; notaires, pour les inventaires de succession et des régimes matrimoniaux ;
- avocats, lorsqu’ils ont la mission de professionnels qualifiés dans les procédures de divorce ou lorsqu’ils sont rédacteurs ou protecteurs dans le cadre d’un mandat de protection future ;
- mandataires judiciaires à la protection des majeurs ;
- administrateur successoral ;
C’est-à-dire, exclusivement par des professionnels ayant le statut légal d’auxiliaires de justice.
L’inventaire des meubles meublants est déposé entre les mains d’un notaire, et validé par acte authentique pour les successions. Il est remis au juge du divorce ou au greffier en chef pour les protections judiciaires des majeurs.
Quelles sont les difficultés à établir un inventaire ?
La plus grande difficulté consiste à ne rien omettre. Les personnes ont souvent perdu la mémoire de la composition de leur patrimoine et leur titre de propriété au fil des héritages ou déménagements successifs :
- une parcelle de terrain, héritée des grands-parents ;
- les modifications du cadastre ;
- une cave, une chambre de service, un parking dépendant d’un appartement ;
- une vente ou un achat mal publié ;
- une servitude oubliée ;
- une société tombée en déshérence ;
- etc.
L’inventaire, c’est la recherche de ce qui manque.
Comment y remédier ?
- Les fichiers publics : cadastre, fichier immobilier, registre du commerce et des sociétés, sont des références ouvertes à tous.
- Les fichiers particuliers : le fichier des comptes bancaires (FICOBA) n’est pas public. En matière de divorce, il faut une décision judiciaire pour que le notaire ou le professionnel qualifié y ait accès. Le mandataire judiciaire professionnel vient d’obtenir très récemment la possibilité d’y accéder afin de faire inventaire en début de protection.
Le service AGIRA des compagnies d’assurance sur la vie qui effectue les recherches des bénéficiaires, mais ne donne d’indication que si la recherche est positive pour la personne qui se prétend bénéficiaire, et seulement après le décès du souscripteur. Le fichier FICOVIE n’est pas encore opérationnel. L’accès à ces fichiers particuliers est réservé aux professionnels.
Le patrimoine est composé d’actifs mais aussi de passif. Les emprunts, les découverts bancaires doivent aussi être inventoriés car leur gestion va gravement influer sur le budget.
Que faire s’il manque des biens ?
Il convient d’alerter le juge des tutelles qui autorisera des recherches auprès des banques et du fichier FICOBA, et de porter plainte pour abus de faiblesse si l’on a une idée de l’auteur des faits.
L’inventaire n’a pas pour mission de reconstituer le patrimoine au profit des héritiers, mais de donner une photographie des biens de la personne à protéger au moment de la protection. Néanmoins, cet inventaire sera fort utile au moment de la succession.
Elément essentiel de la protection judiciaire ou par mandat de protection future, l’inventaire doit être fait avec sérieux, afin de maintenir le patrimoine de la personne à sa disposition en cas d’insuffisance des revenus.
Si elle a été victime d’abus de faiblesse et de maltraitance financière, il permettra de compenser par l’engagement de recherches pour tenter de récupérer ce qui lui a été pris. Il servira aussi de preuve pour solliciter auprès du tribunal, la nullité des actes qui auraient causé préjudice.
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