Faut-il un droit pour les personnes âgées ?
Les droits des personnes âgées préoccupent les pouvoirs publics tant sur le plan national qu’international. La France est en pointe et de nombreuses associations et ONG françaises travaillent sur cette problématique. Mais le sujet n’est pas simple. Point sur les textes existants et les réflexions en cours.
Quelles instances et quels textes protègent les personnes âgées aujourd’hui ?
- Au niveau international
La FIAPA (Fédération Internationale des Associations des Personnes Âgées), à la suite de la rédaction de sa charte universelle de la protection juridique des personnes âgées, a participé à New York à la préparation de la Convention des droits des aînés vulnérables en cours de négociation entre les pays membres de l’ONU. Au sein du Conseil de l’Europe, dans le cadre de la Commission des Droits de l’Homme, la FIAPA anime notamment la Commission sur les maltraitances concernant les personnes vulnérables et participe également en qualité d’expert aux réflexions du Comité Directeur pour les Droits de l’Homme en vue de l’unification en Europe de la protection des personnes vulnérables.
- En France :
La Fondation Nationale de Gérontologie a publié en 1996 puis révisé en 2007 la Charte des droits et liberté de la personne âgée en situation de handicap et de dépendance.
Concrètement, cette charte rappelle, par exemple, que la chambre de la personne dans une maison de retraite est son domicile et doit être respecté en tant que tel, notamment la liberté d’y recevoir librement toute personne de son choix. Au quotidien, frapper avant d’entrer et attendre la réponse, si possible. Les établissements ont désormais l’obligation de former leur personnel à se conformer à ces préconisations.
La FIAPA travaille en étroite collaboration avec le Défenseur des droits et la ministre déléguée en charge des personnes âgées et de l’autonomie pour la promotion de la Charte universelle de la protection juridique des aînés vulnérables.
La fédération est membre au sein du comité national pour la bientraitance et les droits des personnes âgées et des personnes handicapées (décret n° 2013-16 du 7 janvier 2013). Ce comité est une sorte d’observatoire regroupant les administrations et les organisations publiques et privées en charge des adultes âgés et des personnes handicapées.
Des textes difficiles à élaborer pour protéger les personnes âgées
L’élaboration de ces textes se heurte à une double difficulté :
- Comment protéger sans priver de liberté ? Les droits de la personne âgée sont ceux de tout citoyen.
- Comment concilier des cultures différentes mais aussi des niveaux de vie très différents ?
Il n’est pas nécessaire de promouvoir de nouveaux droits fondamentaux spécifiques aux personnes âgées :
- Celles-ci étant des adultes, tout texte déjà existant au profit des adultes comme la Convention européenne des droits de l’Homme, s’applique bien entendu aux personnes âgées ;
- La promotion de droits fondamentaux spécifiques aux personnes âgées aurait un effet stigmatisant et risquerait d’entraîner une discrimination certaine. Les effets en seraient aussi néfastes pour les personnes concernées que pour la cohésion du corps social. La France s’oppose culturellement à toute discrimination positive qui existe dans d’autres pays.
Ainsi, la défense des droits porte sur la reconnaissance, non pas de droits fondamentaux spécifiques aux personnes âgées, mais concerne, selon les situations l’ensemble des personnes en situation de handicap, de fragilité et de vulnérabilité en raison des limites physiques et psychiques de leurs capacités décisionnelles, entraînant une situation de dépendance d’autrui dans les gestes de la vie quotidienne.
La promotion des droits fondamentaux porterait donc sur la reconnaissance de ce que toute situation de faiblesse, et non pas celle de l’avancée en âge exclusivement, justifie une aide spécifique. La difficulté porte surtout sur la définition de la vulnérabilité qui ne peut être codifiée. Il faut donc travailler à la recherche de moyens pour la repérer, la prévenir et s’en protéger. Les conventions en France, pour les citoyens de l’Union européenne ou à vocation mondiale, semblent s’orienter vers les grands principes suivants :
- La liberté prime sur la sécurité ;
- L’égalité implique que ne soit tolérée aucune discrimination, qu’elle soit liée à l’âge ou au handicap ;
- L’évolution des comportements passera par l’éducation de la jeunesse et le maintien de liens solidaires dans les familles et la société.
Pourquoi cette démarche est essentielle ?
Ces travaux de chercheurs, de professionnels pluridisciplinaires – médecins, juristes, travailleurs sociaux, représentants des personnes concernées et de leurs familles – peuvent paraître théoriques, mais ils ont de multiples incidences pratiques dans le repérage des besoins de la population, l’aide à apporter aux plus vulnérables et leurs proches, la recherche de la réduction des souffrances en humanisant le lien social afin qu’aucun citoyen ne se sente abandonné.
Par exemple, en France, notre protection sociale institue des régimes différents selon l’âge : avant 60 ans une personne est qualifiée d’handicapée et peut bénéficier des aides humaines et techniques dont elle a besoin. À partir de 60 ans, la même personne dépendra du régime de la perte d’autonomie qui ne sera pas en mesure de lui fournir les mêmes aides adaptées à un handicap similaire. Cette situation qui perdure à ce jour malgré les revendications tant des associations de personnes âgées que de personnes handicapées est source de nombreuses difficultés pour beaucoup de proches concernés.
Le fait de publier dans une convention internationale que les droits d’une personne ne sont pas liés à son âge mais à un handicap ou une vulnérabilité particulière, est fondamental. La France, comme tout autre pays qui adhérera à la prochaine convention de l’ONU, sera contrainte de mettre en place un système de protection sociale adapté à ces principes.
D’ores et déjà, le numéro vert 3977 géré par l’association ALMA (Allô écoute Maltraitance) permet à toute personne âgée ou handicapée, ainsi qu’à son entourage, de trouver écoute, conseils et services mais aussi de signaler les difficultés afin qu’elles soient traitées et signalées au Comité national de la bientraitance et son observatoire.
Pour conclure, un droit spécifique aux personnes âgées n’est pas nécessaire. En revanche, il est impératif de faire reconnaître leurs droits.
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